Le Jardin de la Collerette : les roses dans un jardin Renaissance
L’aménagement de beaux jardins autour du puissant château de Montargis est dû à Renée de France, fille de Louis XII et d’Anne de Bretagne, Dame de Montargis, Duchesse de Chartres et Duchesse de Ferrare par son mariage avec Hercule d’Este. Toute imprégnée de la beauté des palais italiens de la Renaissance, en particulier les fameux jardins de la Villa d’Este, lorsqu’elle arrive à Montargis au milieu du 16e siècle, elle demande au célèbre architecte Jacques Androuet du Cerceau de lui dessiner des jardins dans l’esprit de ceux qu’elle avait connus en Italie. Elle fait venir auprès d’elle son jardinier de Ferrare, Jérôme Teste, qui sera chargé de créer et de gérer ces jardins. Il deviendra Jardinier du Roi et de Madame Renée de France.
Du Cerceau, dont les plans de 1576 nous sont parvenus, dessine deux jardins disposés « en collerette » autour des murs de la vieille forteresse. Ces jardins étaient composés de « carreaux » très réguliers, bordés de buis taillés, situés de part et de deux importants labyrinthes.
Ces jardins ont disparu, comme une bonne partie du château. Mais la ville de Montargis a entrepris la reconstitution d’une partie de ces jardins dits de la Collerette, dans l’esprit de la Renaissance, d’après les plans de Cerceau. Ils ont retrouvé une seconde vie, avec une haie de contour de charmilles, leurs carrés d’arbres fruitiers bordés de buis, et leurs palissades de rosiers.
Les variétés de rosiers plantées sont celles, encore peu nombreuses et très simples, que l’on trouvait dans les jardins à la Renaissance : l’églantier odorant ou rosa rubiginosa dont les fleurs d’un rose délicat exhalent un parfum suave, tandis que les feuilles, si on les froisse, dégagent une odeur de pomme. Et en plus il a des vertus médicinales indéniables : son huile essentielle (sous le nom d’huile de rose musquée) a des propriétés régénérantes, antirides, cicatrisantes, nourrissantes.
Le promeneur se laissera captiver par le parfum profond de Rosa x Damascena Bifera, dont les fleurs groupées doubles ont des pétales désordonnés d’un joli rose argenté. On l’appelle aussi rosier des quatre saisons ou rosier de tous les mois en raison de sa remontance. La mutation spontanée de la rose de Damas est à l’origine de nombreuses variétés remontantes. Il a été l’un des premiers rosiers cultivés pour la fleur coupée au début du 18e siècle. Cette variété est encore cultivée à Grasse pour les parfumeurs.
La rosa Foetida Bicolor est aussi une petite merveille qui ravira les collectionneurs : originaire d’Asie Mineure et connue avant le 16e siècle, on l’appelle aussi rosier capucine, à cause de la couleur de ses fleurs, jaune vif à l’extérieur et rouge orangé à l’intérieur.
Et d’autres encore… Toutes ces captivantes roses anciennes sont encore en culture chez André Eve.
Entre les jardins de Renée de France à Montargis et la roseraie de l’abbaye Royale de Chaalis
À la Renaissance, Hippolyte II d’Este, cardinal de Ferrare (frère d’Hercule d’Este, donc beau-frère de Renée dame de Montargis) est nommé en 1541 par le roi François Ier premier abbé commendataire de l’abbaye royale de Chaalis. Ce fastueux cardinal est le créateur des fameux jardins hydrauliques de la Villa d’Este à Tivoli. A Chaalis, il fait aménager un jardin de plaisance à côté de l’abbaye, entouré d’un mur crénelé ouvert par une porte Renaissance que l’on peut toujours admirer. Et c’est exactement à l’emplacement de ce jardin d’Hyppolyte d’Este qu’est créée une roseraie dans les années 1920, réaménagée en 2000, en reprenant exactement le dessin du jardin Renaissance.
La Fête de la Rosière à Montargis
Une tradition à laquelle Montargis est restée fidèle avec bonheur : la fête de la Rosière, que l’on y célèbre depuis 1888.
En effet à cette date Madame Duchesne-Rabier léguait à la ville de Montargis la somme de 40.000 francs à placer en rente 3 % sur l’État et servir à la fondation d’une rosière pour, chaque année, récompenser la plus laborieuse et la plus méritante des orphelines ou une jeune ouvrière de la ville.
Et depuis, chaque année, en juillet, c’est une ravissante jeune fille, couronnée de roses blanches et de feuillages, qui, au bras du maire de la Ville, est récompensée de ses mérites, plus particulièrement de sa sagesse et de son dévouement. Un lâcher de pigeons, symbole de paix et de bonheur clôt cette charmante cérémonie estivale qui perpétue une bien jolie tradition loirétaine.
Le joli théâtre de Montargis
Il a été construit en 1836 par l’architecte Rose. Il est aujourd’hui détruit et remplacé par l’hôtel des Postes.
En 1912 on y jouait Primerose.
La légende de la dernière rose de Montargis
En ce temps-là les plus belles roses de France poussaient dans les splendides jardins du château de Montargis… C’est une belle histoire, joliment romancée, qui a pour cadre le fameux Siège de Montargis de 1427 pendant la Guerre de Cent Ans, alors que, assiégés par les Anglais et à bout de ressources, les habitants reçoivent les secours inespérés de valeureux chevaliers La Hire et Dunois, derniers défenseurs du roi de France, et qui n’allaient pas tarder à se retrouver aux côtés de Jeanne d’Arc à Orléans en 1429.
Cette histoire se trouve dans un ouvrage pour la jeunesse intitulé Dunois et les compagnons de Jeanne d’Arc, par Ch. Quinel et A. de Montgon, 1931. Ce livre est consultable à la Médiathèque d’Orléans.
Les roses de Girodet
Le peintre célèbre Anne-Louis Girodet, enfant de Montargis, (dont le Musée Girodet possède un ensemble important de peintures, de dessins et de manuscrits qui illustrent sa carrière, ses talents et son goût pour la poésie), a adoré les roses.
Dans sa maison de campagne, au château du Verger à Chuelles, propriété familiale dont il a hérité, en gentilhomme champêtre, il s’adonne aux plaisirs du jardinage, taille ses charmilles, désherbe ses allées, et cultive des roses, dont il envoie des bouquets à belles amies et élèves, accompagnés de mots galants : « Voici un panier que notre Flore paysanne vous envoie : au bouquet de roses du Verger, elle n’a pas craint de mêler quelques fleurs des champs. C’est pour que vous ne doutiez pas que tout le Verger se joint à son maître pour vous offrir ces modestes tributs. » (Lettre à Françoise Robert, 16 juin 1821, dans les Œuvres posthumes de Girodet-Trioson, 1829, t. II, p. 349-351).
Poète à ses heures, il a chanté la rose à la manière des poètes antiques avec le poète grec Anacréon qu’il aima à traduire en vers français :
Eloge de la Rose.
Je veux que, dans un festin,
La fleur aux amours consacrée
Mêle son doux parfum aux doux parfums du vin.
Lorsque la table est préparée
Combattons, la coupe à la main,
Le front couvert de roses purpurines.
La rose est la reine des fleurs,
La rose plait par ses douces odeurs
Aux habitants des demeures divines.
La rose est l’honneur du printemps,
Elle est l’amante de Zéphire,
Elle ravit à la fois tous les sens.
Célèbre la rose, ô ma lyre :
De Cupidon le front charmant
Est orné de roses naissantes,
Lorsqu’aux choeurs des Graces décentes
Il se mêle avec enjoûment.
Voir : Les roses du Loiret et les poètes
La rose dans les tableaux de Girodet
Dans l’Antiquité, la rose est la fleur de Vénus, la fleur de l’Amour. Cette signification symbolique de la rose apparaît essentiellement dans deux célèbres tableaux de Girodet : Danaé, 1797 (musée de Leipzig) où l’artiste a préféré représenter la jeune femme séduite par une pluie de bijoux et de fleurs – dont de nombreuses roses tombées à ses pieds – plutôt que par la pluie d’or symbolisant Zeus dans la tradition mythologique ; et Pygmalion amoureux de sa statue, dit aussi Pygmalion et Galatée (1819, musée du Louvre). Au pied de la statue, un bouquet de roses : Le bouquet de roses joue ici plusieurs rôles. La rose est, dans l’antiquité, associée à Vénus, laquelle joue un rôle fondamental dans le mythe. Les fleurs, ici, au nombre de deux, sont blanches avec un cœur légèrement rose. La couleur blanche reprend la pureté du marbre de la statue, et la couleur rouge fait écho à l’habit de Pygmalion et donc à son sang royal. On remarque également que les teintes du bouquet, ainsi que le ruban qui maintient les fleurs est un écho de la couronne de fleurs tressées qui orne les cheveux de Pygmalion, laquelle est fermée par un ruban blanc en tout point semblable à celui au sol.
On retrouve la rose reine des fleurs dans un tableau conservé au Musée Girodet : « Scène Anacréontique, Contre l’Or ».
Sur d’autres œuvres du musée figurent également des roses, par exemple :
– Héloise Vuitel, La Folie guidant l’Amour, vers 1897 : un bouquet de roses est à terre derrière la Folie ;
– Chaplin, Le Château de carte, 1865 : la jeune fille est vêtue d’une robe rose qui donne toute sa vivacité de ton au tableau ;
– Janssens, Galerie d’amateurs, fin XVIIe : un tableau dans le tableau représente une couronne de fleurs ornée de roses…
De plus, figure au plafond de la bibliothèque du musée Girodet le portrait de Guillaume de Lorris, auteur du premier roman en langue française au XIIIe siècle, Le Roman de la rose (continué par Jean de Meung), roman que possédait d’ailleurs Girodet en deux exemplaires.